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Soutenir la santé mentale des futur-es médecins

Stress, anxiété, dépression: la santé mentale des étudiantes et étudiants en médecine est, dès leur première année, mise à rude épreuve. Le passage aux années master puis les années d’internat peuvent, elles aussi, être source de souffrance. Comment renforcer les soutiens? Quel rôle peut endosser la Faculté face à une problématique essentielle pour la santé des futur-es médecins et celle de leurs patient-es? Un récemment paru dans la Revue médicale suisse (RMS) fait le point sur ce sujet et propose quelques pistes de réflexion. 

Numéro 53 - juin 2025

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Marie-Anne Pham diplômée en 2022, mène actuellement des recherches sur la santé mentale des étudiant-es en médecine dans le cadre d’un doctorat et co-signe l’article de la RMS. «En 2019, avec d’autres étudiant-es, nous avions déjà à cœur de mieux prendre en compte la santé mentale de nos pair-es», relate-t-elle. «Les sondages que nous avons faits alors ont montré un niveau de stress élevé – plus que chez les autres jeunes du même âge – et une méconnaissance des ressources disponibles.» De ce constat est né le projet , porté par l’Association des étudiant-es en médecine de Genève (), qui propose différents types d’activités et de ressources pour soutenir les étudiant-es et favoriser le mentorat entre pairs.

«Les objectifs PROFILES, qui définissent les compétences à acquérir dans le cursus médical suisse incluent des compétences personnelles, et notamment la capacité à prendre soin de soi: prendre soin des autres nécessite aussi de prendre soin de soi», souligne le professeur Mathieu Nendaz, vice-doyen en charge de l’enseignement pré-gradué et de l’identité professionnelle. «La Faculté de médecine se doit donc d’accompagner les étudiant-es en leur fournissant les outils nécessaires et ainsi les aider à construire une identité professionnelle solide.»

Repenser la formation à la supervision clinique

Ces questions ont aussi un impact sur les carrières médicales: un tiers des étudiant-es pense à abandonner ses études à l’issue de leur premier stage clinique, et 10% des médecins formé-es n’exerceront pas. «Dans un contexte de pénurie médicale croissante, cela a un impact non négligeable sur le système de santé», note Marie-Anne Pham. «Le stress provient à la fois de facteurs internes, propres à chacun-e, et de facteurs externes, liés aux conditions d’études ou de travail. À mon sens, les institutions de formation pourraient faire davantage pour agir sur ces derniers.»

Si le concours de fin de première année reste un facteur de stress majeur, l’entrée en stage clinique peut également être déstabilisante: comprendre les dynamiques, trouver sa place, savoir réagir dans des situations complexes – comme celles liées à la fin de vie – n’est pas évident. «Le métier de médecin implique des situations difficiles au quotidien, des horaires irréguliers, un équilibre professionnel-privé parfois défaillant», note Marie-Anne Pham. «Il ne s’agit pas de supprimer les difficultés, ni la sélection exigeante de la première année, mais de mieux armer les étudiant-es, de former les médecins en charge de la supervision, et surtout de ne pas minimiser l’impact de ces situations sur la santé mentale.»   

Le milieu médical, souvent encore très hiérarchique, a parfois du mal à se remettre en question. «De même que dans le cas du sexisme, du racisme ou du harcèlement, les structures rigides et la loi du plus fort qui règnent encore dans certains services est délétère, pour les soignant-es comme pour les patient-es», ajoute Marie-Anne Pham. «Cela commence à changer, grâce aussi à la réelle volonté de la Faculté de médecine de se saisir de cette question.»

Se préparer aux réalités du métier

La médecine n’est pas une somme de gestes techniques, mais implique un ensemble de compétences qui, ensemble, formeront un ou une professionnelle. «Les compétences de leadership sont également clé», analyse Mathieu Nendaz. «Comment prendre sa place dans une équipe soignante, comment se positionner en tant que leader, comment faire face aux contraintes et aux difficultés: tous ces éléments sont au cœur des modifications de curriculum que nous introduisons actuellement, et dans lesquelles s’impliquent également des étudiant-es et de jeunes collègues.» 
«Il est aussi important de ne pas s’enfermer dans une voie qui ne nous correspond pas. Mais les études de médecine représentent un tel investissement que changer de cap est une décision difficile», souligne par ailleurs Marie-Anne Pham.

Des ressources existent

Au cours des dernières années, plusieurs mécanismes ont été développés afin de soutenir celles et ceux en difficultés: un groupe de soutien à l’apprentissage pour les aspects académiques, mais aussi des ressources en termes de mentorat ou de soins de santé (voir encadré). «Nous aimerions aussi mettre en place un système de supervision neutre pour les années master pour pouvoir aborder toutes sortes de situations anxiogènes ou stressantes sans passer par l’encadrement. Cela permettrait de moins dépendre de la sensibilité des équipes cliniques et de la personne en charge de la supervision. Et surtout ne pas hésiter à demander de l’aide», conclut Marie-Anne Pham.

Dre Marie-Anne Pham
Doctorante à l’Institut de médecine de famille et de l’enfance (IuMFE) de la Faculté de médecine
Médecin interne en formation post-graduée en médecine interne générale

Pham, M., Bochet, P., Jermann, F., Haller, D., M., Piguet, C. (2025), Soutenir la santé mentale des futurs médecins: pistes de réflexion, Rev Med Suisse, 21, no. 917, 957–961.


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